Éditorial de mars 2023

Cher(e) Ami(e), Cher(e) Membre, Che(r)e Soutien,


 L’actualité internationale
 
Cela ressemble bien à une avancée déterminante en matière de diagnostic pour Lyme : une nouvelle approche, la spectroscopie Raman, vient d’être testée avec succès par l’équipe de Nicolas K. Goff, du laboratoire de l’Université de College Station au Texas. Cette technique, bien connue depuis les années 30 en biochimie et en biophysique, est à présent de plus en plus utilisée en biologie, notamment pour analyser les anticorps présents dans le sang. Les résultats publiés par cette équipe sur Lyme, sur les Borrelioses en fait, sont très prometteurs. Bien sûr, d’autres études seront nécessaires pour compléter ces travaux. Cela prendra encore du temps, mais si ces premiers résultats sont confirmés, cette technique pourrait changer radicalement le paysage, et mettre un terme aux polémiques engendrées par le manque de fiabilité des test actuels.


Une autre nouvelle en provenance des USA a également retenu notre attention ce mois-ci : un hôpital a été condamné à payer 6,5 Millions de dollars pour la mort injustifiée d’un patient Lyme qui n’avait pas été diagnostiqué. Peter Smith, 25 ans, est décédé de la cardite de Lyme à Portland, dans le Maine, après avoir été examiné deux fois sans être diagnostiqué, malgré une batterie de symptômes suggérant fortement la phase disséminée aigüe de Lyme (fièvre, frissons, étourdissements, maux de tête, troubles cardiaques, érythème migrant..). Ces faits tragiques remontent à 2017, ils viennent d’être jugés et c’est donc une première : pour la première fois un hôpital est condamné pour défaut de diagnostic concernant la maladie de Lyme. Gageons que ce précédent aura au moins un mérite : alerter les hôpitaux et les médecins pour qu’ils pensent à la maladie de Lyme parmi les hypothèses de diagnostic à l’avenir.


Le week-end dernier, s’est tenu le LivLyme 2023 Summit, une conférence au cours de laquelle 20 spécialistes de premier plan (médecins, professeurs, chercheurs) sont venus présenter l’avancement de leurs travaux sur tous les aspects de Lyme et des autres MVT. Ça fait du bien de voir que des scientifiques et des médecins compétents travaillent sur ces sujets ; il nous faut encore un peu de temps pour digérer ces infos, je reviendrai vers vous prochainement pour vous en dire plus.
D’ailleurs, je profite de cette occasion pour lancer un appel : nous cherchons quelques volontaires pour nous aider à traduire ces présentations (nous disposons des vidéos en streaming), n’hésitez pas à nous faire signe si vous êtes partant(e)s pour traduire une de ces interventions (écrivez-nous sur benevolat@francelyme.fr)


Au programme de cette conférence, figurait notamment le Dr Richard Horowitz, docteur réputé aux USA et dans le monde, et auteur de livres sur la maladie de Lyme. Nous avons pris contact avec lui, et il a accepté avec enthousisame de participer au Webinaire que nous allons organiser dans le cadre de la Journée Nationale Lyme (aussi appelée « Lyme Protest ») cette année.
Il fera une présentation de ses derniers résultats en matière de traitement Lyme, et nous aurons ensuite l’occasion de dialoguer avec lui directement, puisqu’il parle très bien français.
La date pour l’instant est fixée au mardi 16 mai, nous reviendrons vers vous pour vous la confirmer.

 


L’actualité nationale

A l’Assemblée Nationale

Nous continuons à rencontrer des députés pour faire entendre la voix des malades, et en particulier pour remettre en place ce Groupe d’Etude Lyme, qui existait à l’Assemblée Nationale dans l’ancienne mandature et qui a été supprimé par la nouvelle, sans la moindre information ni discussion avec les principaux intéressés.
Deux d’entre eux les députés Inaki Echaniz (Pyrénées Atlantiques) et Bertrand Sorre (Manche) ont posé des questions au gouvernement, portant sur l’errance médicale, la défaillance dans la prise en charge des malades, et l’absence de moyens pour financer la recherche. Je vous invite à aller voir ces questions, précises, bien argumentées, sur le site de l’Assemblée Nationale (questions n° 3158 et 5806).
Ces deux questions ont obtenues une réponse rédigée dans la plus pure langue de bois, celle-ci est consternante. A titre d’exemple, voici sa conclusion :
« Certaines pratiques diagnostiques ou thérapeutiques mises en œuvre à l’étranger n’ont pas fait la preuve scientifique de leur efficacité et ne peuvent donc pas être recommandées sans mettre en jeu la sécurité des patients. Le ministère a donc mis en place une organisation spécifique pour les patients en errance médicale et les soins dispensés en France sont conformes aux standards internationaux en la matière »
Comprenez : « circulez, il n’y a rien à voir, tout va très bien Mme la Marquise »…
Juste un commentaire au sujet des « pratiques diagnostiques ou thérapeutiques mises en œuvre à l’étranger » qui « n’ont pas fait la preuve scientifique de leur efficacité et ne peuvent donc pas être recommandées sans mettre en jeu la sécurité des patients » :
pourquoi tant de malades français se dirigent-ils vers l’Allemagne, la Suisse, la Belgique ou même vers les Etats Unis ? Est-ce par pur masochisme, pour perdre de l’argent, et pour risquer leur santé ? Bien sûr que non.


C’est bien parce qu’ils n’ont pas trouvé de diagnostic et de prise en charge en France que ces malades sont partis vers l’étranger. Et d’ailleurs beaucoup ont trouvé là un diagnostic et souvent des traitements qui ont amélioré leur état de santé. Et l’on peut ajouter que cela se passe dans une injustice totale, car pour la plupart des malades, aller à l’étranger pour se faire soigner est tout simplement impossible.


Les rapports parlementaires sur Lyme publiés ces dernières années sont en totale contradiction avec la réponse donnée au député. Ils montrent à quel point la situation des malades est dégradée, et combien l’état manque à ses devoirs en ne finançant aucune recherche sur la maladie.
Ces rapports listent un grand nombre de recommandations adressées aux autorités sanitaires et à l’exécutif, qui sont autant de mise en demeure restées lettre morte jusqu’à présent.


Mais nous ne nous résignons pas, croyez le bien, nous ferons tout ce qui est possible pour faire entendre la voix des malades dans l’hémicycle et au Ministère. Nous prendrons dans les semaines qui viennent d’autres initiatives dans ce sens.

 


Retour d’expérience des malades sur les CRMVT

Le mois dernier, j’avais commenté ici-même des résultats de sondages que nous vous avons proposé en 2022. Je voudrais compléter ici par d’autres résultats issus d’un de ces sondages, qui comportait des questions spécifiques sur les Centres de Référence et les Centres de Compétence Lyme. Vous avez été nombreux (372 !) à participer à ce sondage, nous vous adressons à nouveau un grand MERCI pour votre contribution. Et parmi ces 372 personnes, 82 d’entre vous ont pu apporter leur témoignage suite à leur consultation dans un de ces Centres.


J’ai eu l’occasion de présenter les résultats de ce sondage à un certain nombre d’infectiologues réunis lors d’une journée de travail sur la maladie de Lyme il y a quelques semaines, et je souhaite partager ici une synthèse des résultats avec vous (je vous invite à aller voir les détails dans l’article ci-dessous, posté sur notre site)


Voici quelques messages à retenir :


– Tout d’abord, 4 ans après la mise en place de ces Centres créés pour prendre en charge les malades Lyme, force est de constater que les généralistes ne sont toujours pas informés de leur existence : seuls 12 % des malades ont été dirigés vers l’un de ces Centres par leur médecin traitant ! Cela confirme malheureusement ce que nous voyons tous les jours parmi les personnes qui nous contactent : les généralistes ne sont pas formés lors de leurs études sur Lyme et les MVT, ils n’en connaissent souvent même pas les rudiments, ni les Recommandations officielles de 2018 qu’ils doivent appliquer, et ils ne semblent pas être au courant de l’existence de ces Centres. Dès cette première étape du dispositif de diagnostic et de traitement, on est dans l’impasse, avec une conséquence immédiate pour les malades : une errance médicale massive dès le départ.


– Ensuite, parmi les personnes ayant tenté de consulter ces Centres, 17 % n’ont pas « réussi » à obtenir de RdV, pour des raisons diverses. Ça fait beaucoup tout de même, cela mérite d’approfondir les motivations de ces 17 % d’échec, les CRMVT souhaitent qu’on en discute avec eux, ça tombe bien, nous aussi.
On observe aussi que 68 % de l’ensemble des répondants déclarent ne pas avoir essayé de prendre RdV dans un de ces Centres. Sans doute parce qu’une partie d’entre eux ne connaissent pas leur existence. Mais sans doute aussi parce que beaucoup d’entre eux n’ont pas confiance dans ces Centres, et les résultats qui suivent, pour le moins mitigés, peuvent expliquer cette défiance. On sait tous que la confiance ne se décrète pas, qu’elle se construit avec le temps, et surtout avec des preuves tangibles qui nourrissent la confiance. Et on verra plus loin qu’il y a de bonnes raisons d’espérer.

 


– La durée des consultations dans ces Centres nous étonne énormément : dans 55% des cas, la consultation dure moins de 30 minutes. Or il s’agit pour l’essentiel de « premières ou deuxièmes consultations », comme on le verra plus loin, car souvent il n’y a pas de 3ème consultation dans le Centre. Quand on voit le nombre de symptômes différents présentés par ces patients, et la taille des dossiers médicaux accumulés précédemment, sur des années le plus souvent, on imagine difficilement une consultation sérieuse et fouillée en si peu de temps.


– Concernant le diagnostic établi par ces Centres, deux choses nous interpellent :
23 % des malades ressortent sans aucun diagnostic, alors que précisément, ces Centres spécialisés ont été créés pour poser un diagnostic, et orienter les malades. Que deviennent ces malades ?
Par ailleurs, comment se fait-il que suivant les Centres (Centres de Référence ou Centres de Compétence), il y ait autant d’écart dans les diagnostics ? Par exemple, le diagnostic « Lyme confirmée » qui varie de 13 % à 38 % suivant les Centres ! De même pour le diagnostic « Lyme possible », qui varie lui de 10 % à 34 % ! De tels écarts (de 1 à 3, c’est énorme !!) ne peuvent s’expliquer que par l’hétérogénéité des méthodes de diagnostic.
Dans les diagnostics posés par les Centres, une autre « surprise » pour nous : il n’y a aucune mention de co-infections ou d’autres MVT, alors qu’elles sont très fréquentes parmi les malades Lyme (les médecins allemands et américains disent d’ailleurs qu’elles sont la règle, et non l’exception)


– A l’issue de la première consultation, on observe que près des deux tiers des malades ne sont orientés vers aucun autre spécialiste, pour des examens complémentaires. C’est pourtant une des dimensions importantes de ces Centres, qui cherchent à travailler en équipes comportant des médecins de différentes spécialités, pour traiter au mieux les patients.


– Pour 55 % des patients, la durée de la prise en charge est inférieure à 3 mois (pour 38 % il n’y a même eu qu’une seule consultation), ce qui est pour le moins étonnant.


– A la question « Avez-vous eu l’impression d’être compris par ce Centre ? », 58 % répondent positivement, et 36 % répondent négativement. Mais ces valeurs globales cachent des écarts abyssaux entre les Centres. Suivant les Centres, les malades répondent « Tout à fait d’accord » avec des valeurs qui varient de 14,8 % à 50 % !.. De même ils répondent « Pas du tout d’accord » avec des valeurs qui varient de 11,5 % à 66,7 % !
Précisons que ces valeurs ne sont pas entre chaque Centre à l’échelle individuelle, mais entre les deux groupes de Centres (Centres de Référence d’un côté, et Centres de Compétence de l’autre), pour que les nombres de répondants soient plus représentatifs.


– Les mêmes remarques s’appliquent également aux questions suivantes :
« Etes-vous d’accord avec le diagnostic posé par ce Centre ? » et « Vous sentez-vous bien pris en charge par ce Centre ? », qui présentent les mêmes écarts énormes suivant les Centres, avec les mêmes interrogations : comment peut-on expliquer des différences pareilles, si ce n’est par les méthodes de travail de ces Centres.


– Au total, cela conduit logiquement au même résultat pour la question cruciale « Votre santé s’est-elle améliorée suite à votre consultation dans ce Centre ? ». A cette question, 36,5 % des patients répondent « Pas du tout d’accord », avec des valeurs variant de 16,3 % à 76 % suivant les Centres.


– Et à la question finale « A ce jour, êtes-vous globalement satisfait de votre prise en charge ? », les réponses « Oui » varient suivant les Centres entre 17,2 % et 51,0 %, et les réponses « Non » varient entre 49,0 % et 82,8 %.


Comment peut-on avoir des résultats aussi différents suivant les Centres ? Visiblement, certains Centres fonctionnent mieux que d’autres, au regard des malades. C’est à la fois un constat critique par rapport au fonctionnement et à la coordination de l’ensemble des Centres. Mais c’est aussi un message d’espoir pour l’avenir : oui, certains Centres ont des méthodes de prise en charge qui inspirent confiance aux malades, et qui leur permettent de voir leur santé s’améliorer. Ce qui signifie qu’un travail méthodique d’analyse et de généralisation des bonnes pratiques de ces Centres permettrait des progrès rapides et substantiels.


Depuis le début, vous le savez, France Lyme soutient la mise en place d’un parcours de soin intégrant la création de ces Centres spécialisés dans le traitement de Lyme et des MVT. Notre position n’a pas varié depuis.


Car c’est la seule manière de faire progresser à l’échelle nationale à la fois la prise en charge des malades et la recherche clinique. Ce type de dispositif a prouvé son efficacité pour avancer dans beaucoup d’autres maladies.


Ces résultats mitigés, voire même médiocres pour certains Centres, ne nous découragent pas. Ces Centres doivent impérativement s’améliorer, monter en compétence, et surtout prendre davantage en charge les malades portant les formes « tardives » ou « persistantes » de la maladie. C’est comme cela qu’ils apprendront comment traiter les malades au mieux, par la pratique, et par l’accompagnement sur le moyen et long terme.


Nous échangeons avec les CRMVT et avec toutes les parties prenantes sur ces sujets, car c’est un combat fondamental pour France Lyme. Nous vous tiendrons bien sûr au courant des évolutions par la suite.


Une bien triste nouvelle : le décès du Dr Mickael Nord, à Molsheim en Alsace

Le Dr Mickael Nord nous a quitté brutalement il y a quelques semaines. C’est une énorme perte pour sa famille et ses amis mais aussi pour des milliers de patients qu’il suivait. Il était unanimement apprécié par ses patients, à la fois pour ses solides compétences sur la maladie, et aussi pour son humanité. Il savait écouter, expliquer et accompagner les malades, comme le prouvent les nombreux témoignages que nous avons reçus.
Son départ laisse sa famille et ses amis en grand désarroi, et des milliers de patients en détresse et en errance médicale. Nous adressons nos sincères condoléances à toute sa famille.

 


L’actualité de France Lyme

Nous travaillons d’arrache-pied sur un projet important pour l’association, devenir une Association Reconnue d’Utilité Publique (ARUP), comme environ 1800 associations en France. L’objectif est de faire grandir l’association, en lui permettant notamment de recevoir des dons et legs de manière plus favorable, et d’accroître notre légitimité et notre crédibilité vis-à-vis de tous nos partenaires, publics et privés. Parmi les critères pour postuler à cette reconnaissance ARUP, figurent des critères comptables, mais aussi des critères de bonne gouvernance, qui nécessitent d’adopter un nouveau format pour nos Statuts et notre Règlement Intérieur.
L’adoption de ces nouveaux Statuts sera votée lors d’une AGE (Assemblée Générale Extraordinaire) qui sera organisée en ligne, à priori le week-end des 6-7 mai. Le vote aura lieu à distance courant avril. Nous reviendrons vers vous pour préciser ces dates et les modalités de participation.
Pensez à être à jour de cotisation : Cliquez ici pour adhérer en ligne


Nous travaillons également sur la Journée Nationale Lyme (Lyme Protest), qui à l’échelon national se déroulera sous forme de webinaire. La date pressentie aujourd’hui est le mardi 16 mai, dans un créneau 18h30 – 20h30, et le programme qui est en cours de définition promet d’être intéressant, alternant des présentations (un médecin et une thérapeute), et des témoignages de malades. Nous sommes heureux que Mme Claire Delval, thérapeute (et ancien médecin généraliste), qui a une grande expérience dans le domaine ait accepté de participer à notre rendez-vous. Comme je le disais plus haut, nous aurons aussi la chance d’accueillir le Dr Horowitz, qui est un grand spécialiste de Lyme. Je profite de cet édito pour lancer un appel : nous souhaitons partager sur nos réseaux sociaux des témoignages de malades sous forme de capsule vidéo de 1 à 3 min maximum. Plus d’information dans l’article dédié. Un grand merci par avance !


Enfin, comme tous les mois, j’adresse un grand merci à toutes les équipes de bénévoles impliquées dans les actions d’information et de prévention menées sur le terrain dans les Départements et les Régions, notamment ce mois-ci en Bretagne et en Nouvelle Aquitaine.
Merci aussi à Nathalie pour ses VisioLyme, ces rendez-vous d’échanges en visio entre malades. N’hésitez pas à vous y inscrire, c’est une manière simple et efficace pour partager des infos et échanger des retours d’expérience sur la maladie.


Merci pour votre soutien.
Amicalement,

Frédéric MAIRE
Président de France Lyme

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